LA
NOUVELLE ECONOMIE
Une
fois de plus, l'Amérique innove en matière de capitalisme boursier.
Un nouveau concept s'est développé : la Nouvelle Economie. Par
opposition aux valeurs financières traditionnelles, la Nouvelle
Economie touche à ce qui a attrait aux nouvelles technologies.
Internet bien sûr, mais aussi la téléphonie, les chaînes de
télévisons numériques, l'informatique...
La
deuxième Bourse mondiale, le Nasdaq, qui regroupe pour l'essentiel
ces valeurs technologiques, n'arrête pas de progresser. Ce sont les
valeurs des capitalisations des nouvelles sociétés, appelées
Start-up (1), qui sont à l'origine de l'embellie. Le phénomène
haussier dynamise le marché boursier et entraîne dans sa folle
ascension, les indices de référence comme le Dow Jones ou le CAC
40.
Certaines
de ces petites sociétés, disparaissent aussi vite qu'elles sont
nées. Peu importe, d'autres viennent les remplacer et forcément,
leur valeur intéresse les investisseurs institutionnels, mais
également de plus en plus de boursicoteurs à l'affût des bonnes
affaires.
La
folie s'empare des investisseurs, soucieux de rentabiliser leur
placement immédiatement. Peu importe de connaître l’objectif de
la société, ce qu'elle propose, sa capacité financière...
L'essentiel étant maintenant d'acheter du "point com".
L'élan est irraisonné. La mode est d'acquérir une part de ces
sociétés. Depuis plus d’un an, leurs valeurs montent sans
discontinuer.
Des
sites web à vocation financière contribuent à l'émergence de la
Nouvelle Economie : Seltrade, Consors, Fimatex, I Bourse, Cortal...
dépensent des sommes colossales pour se faire connaître. Ces
sociétés proposent aux néophytes de passer en direct des ordres
boursiers en court-circuitant les intermédiaires traditionnels que
sont les banques ou les sociétés de courtage.
Mais
aujourd'hui, retournement de situation : la fièvre boursière vient
d'être stoppée. Toutes les valeurs de la Nouvelle Economie
s'effondrent. Après les fortes hausses, c'est la dégringolade. Le
Nasdaq vient de perdre en quelques jours plus de vingt points ! Les
places financières s'interrogent. Phénomène passager ? Retour à
un juste équilibre des valeurs ?
Les
analystes financiers ne savent plus très bien si cette chute brutale
est bonne ou mauvaise pour la Bourse.
Et
si ce phénomène était provoqué par tous ces petits porteurs qui
ont maintenant la possibilité directement de passer leurs ordres en
bourse ? C'est si simple : il suffit simplement de posséder un
ordinateur. Le reste est un jeu d'enfant...
Quand
on jouait au Monopoly, le plaisir d'acquérir la rue de Belleville,
une Gare SNCF, puis l'avenue Foch et enfin l'avenue des Champs
Elysées…. La joie parfois s'effaçait quand le vent tournait….
vers la banqueroute.
L'ordinateur
va-t-il se transformer en bandit manchot ? Il va permettre en tout
cas à de plus en plus de personnes de jouer aux placements
financiers. L'élargissement de l'accès à la Bourse au grand public
va changer les habitudes d'achats.
La
logique du jeu va-t-elle l'emporter sur la logique financière ? Le
joueur de loto ou du tiercé va-t-il se reconvertir à la Bourse ?
Histoire
d'épater les amis, n'est-il pas merveilleux de voir afficher sur son
écran, un graphique représentant la valeur de son portefeuille
d'actions ? L'impression du contenu sur papier couleur donnera
l'impression d'être un cambiste chevronné.
Autre
évolution des mœurs : la Banque de France constate un accroissement
de l'endettement des particuliers. Il serait la conséquence de
l'intérêt porté par les nouveaux boursicoteurs qui n'ont qu'une
obsession : faire fortune en achetant du "point com"(2).
Comme ils n'ont pas d'argent... ils empruntent !
La
Nouvelle Economie risque de nous réserver d'autres surprises. Voilà
en tout cas une éclatante démonstration des incertitudes et des
aléas de la Bourse.
Une
chose est sûre : même avec cette nouvelle façon d'aborder la
Bourse, celle-ci restera toujours bien fixée sur son piédestal,
même quand on voudra ébranler ses fondements
Attention
messieurs les boursicoteurs en herbe : au jeu d'argent, c'est
toujours le petit qui est plumé ! Le miroir aux alouettes existe
depuis que le monde est monde. Il n'est pas prêt de se briser.
(1)
Start-up : entreprise promise à une croissance rapide
(2)
extension venant après de nom de la société (exemple : IBAZAR.COM)
C.
HOMBERT
Avril 2000